Milliwattmètre analogique 500 MHz

 
   

      Contrairement à beaucoup d'appareils de mesure, celui-ci est analogique, c'est à dire qu'il utilise un galvanomètre à aiguille pour afficher la puissance en dBm.
     Le cœur de ce montage est l'amplificateur logarithmique AD8307 de ANALOG DEVICES. Ce minuscule circuit intégré en CMS (à noter qu'il existe aussi en boîtier DIP 8 broches mais n'est utilisable qu'en dessous de 200 MHz) convertit un signal allant de -75 à +17 dBm en tension avec une pente de 25 mV/dB, de façon linéaire (+/- 1 dB) sur une très large bande passante (0 à 500 MHz). Son prix raisonnable, environ 12 euros chez FARNELL pour de telles performances permet de se passer de toute une circuiterie complexe à mettre en œuvre.

 

     DESCRIPTION & SCHÉMAS

    L'AD8307 est constitué de six étages d'amplification 900 MHz et d'un sommateur. La fiche technique, téléchargeable sur le site d'ANALOG DEVICES, explique très bien le fonctionnement de ce composant.
     En résumé, nous avons à l'entrée un circuit d'adaptation d'impédance 50 ohms composé de 2 résistances de 110 ohms et une de 1 kohm en parallèle suivi d'un réseau de correction qui permet d'égaliser sommairement la bande passante.
     La sortie varie d'une façon linéaire entre 0,2 et 2,5 V en fonction du niveau d'entrée selon la courbe suivante :

                      

     Et les valeurs tirées de ces courbes :

     Voici la courbe relevée sur notre exemplaire :


     L'extension en dessous de -50 dBm a été tracée par extrapolation et ne représente pas la réalité.


     L'alimentation en 5 V est sévèrement filtrée et découplée pour éviter toute induction parasite. Le circuit consommant peu et l'appareil ne servant qu'à des mesures ponctuelles, nous avons opté pour une alimentation par pile de 9 V dans un tiroir amovible.
     Pour ne pas charger arbitrairement la sortie de l'AD8307 avec le galvanomètre, nous avons intercalé un Ampli OP en suiveur de gain unité. L'impédance d'entrée est grande et celle de sortie est faible. La seule contrainte est l'emploi d'un circuit "rail to rail", au moins en ce qui concerne la tension vers la masse qui doit arriver à zéro. De nombreux circuits existent et notre choix s'est porté sur le LMC6482 disponible en quantité dans nos fonds de tiroir.     
     Un ajustable Aj4 de 10 Mohms a été prévu sur la sortie du circuit pour permettre éventuellement de régler la pente à une valeur inférieure à 25 mV/dB mais n'a pas été utilisé ici.
     La broche 5 offre la particularité de déplacer le point d'interception en fonction de la fréquence. Si la mesure est effectuée par un microcontrôleur, cette broche est laissée en l'air et le décalage se fait alors par le microcontrôleur en fonction de la fréquence.
     Dans notre cas, avec une échelle unique sur le galvanomètre, nous allons nous servir de cette broche pour décaler la courbe. Une tension variable de 5 à 4,5 Volts permet de régler le point d'interception. Ce potentiomètre P1, accessible en face avant, est gradué en fréquence.

RÉALISATION

     Tout repose sur la tête de mesure qui devra être réalisée avec soin. La soudure de l'AD8307 et des autres composants en CMS ne pose pas de problème si l'on suit les conseils donnés par ailleurs sur ce site. Cela impose la réalisation d'un circuit imprimé double face avec certaines pistes très fines mais s'effectue aisément avec les moyens modernes dont on dispose avec PC, imprimante et films transparents.
     Le blindage de cette tête de mesure est recommandé surtout si on incorpore une alimentation secteur. Nous avons opté pour de l'époxy cuivré double face de 1 mm, facile à travailler et à souder. Les connexions se font par des traversées de cloison capacitives (1 à 1,5 nF).


Tête de mesure avant soudure du couvercle

     La principale difficulté pour cette réalisation, au demeurant fort simple, sera de trouver le bon galvanomètre. En effet, pour bénéficier d'une lecture confortable et précise, il devra être de grande dimension et ne se trouve malheureusement pas dans les catalogues. Il va falloir rechercher la bête rare du côté de certains vieux appareils de mesure. Un critère important sera de pouvoir le démonter pour en extraire l'ancien cadran et y substituer celui que l'on va confectionner.
 

MISE AU POINT

     Elle consiste essentiellement à graduer le cadran du galvanomètre et celui du potentiomètre. Pour une précision optimale, l'utilisation d'un générateur allant au moins jusqu'à 500 MHz est requise. Ce sera idéalement un générateur synthétisé mais le générateur de tracking d'un analyseur de spectre, à la fois réglable en fréquence et en dBm fait aussi l'affaire.
     L'étalonnage de ce milliwattmètre en se basant sur la courbe de la fiche technique est déconseillé car la dispersion entre circuits est assez grande. Tout au plus, elle peut servir à vérifier que tout va bien.
     La procédure consiste d'abord à mettre au point la partie qui suit la tête de mesure. Elle pourra être dégrossie en simulant les tensions données par la courbe de la fiche technique. Cela permettra de voir si tout fonctionne convenablement et de déterminer la résistance R8 avec Aj3 en milieu de course qui dépend du galvanomètre utilisé. Pour information, avec un galvanomètre de calibre 100 µA et une résistance interne de 2200 ohms, R8 fait 18 kohms avec un ajustable Aj3 de 10 kohms.
     A l'aide du générateur, nous avons relevé les tensions en sortie (théoriquement la même qu'en entrée) du LMC6482 en fonction de la puissance incidente sur l'entrée mesure à 500 MHz en prenant la précaution de tourner le potentiomètre P1 en butée dans le sens horaire. Ensuite nous avons tracé la courbe à l'aide du tableur EXCEL. Ceci nous a permis d'extrapoler les valeurs au-dessus de 0 dBm car le générateur utilisé s'arrête à cette valeur.
     La graduation du potentiomètre P1 se fait de la façon suivante :
- Tourner P1 en butée dans le sens horaire.
- Injecter 0 dBm à 500 MHz et repérer l'indication sur le cadran.
- Injecter 0 dBm à 450 MHz et tourner P1 jusqu'à avoir exactement la même indication. Noter la position de P1.
- Faire de même de 400 à 1 MHz en notant à chaque fois la position de P1.
     On remarquera que les graduations ne suivent aucun ordre logique de progression, conséquence probable d'une circuiterie interne mystérieuse ! De plus, il y a repli pour certaines fréquences. Par exemple, 405 est à peu près sur 400, 415 sur 320, 420 sur 310, pour revenir ensuite logiquement au-delà de 400.
     En toute rigueur, il aurait fallu utiliser un bouton gradué avec une table de correspondance. Cette constatation amène à une remarque concernant les milliwattmètres numériques à microcontrôleur qui disposent de plusieurs plages d'étalonnage nommées souvent HF, VHF, UHF. Surtout en ce qui concerne les fréquences élevées, l'étalonnage devrait se faire sur les fréquences les plus souvent utilisées, par exemple 145 MHz pour les VHF et 433 MHz pour les UHF.
     Une mesure en dehors de ces fréquences apportera inévitablement des erreurs, d'autant que l'on a tendance à lire des dixièmes, voire des centièmes de dBm sur un afficheur à deux décimales !
     Les deux cadrans ont été réalisés à l'aide d'un logiciel de dessin et imprimés sur du papier assez épais (260 g/m2).

MESURES

     Cet appareil va parfois être utilisé directement mais le plus souvent au travers d'un atténuateur car il est relativement rare de travailler avec des milliwatts. D'où l'intérêt des coupleurs à tore de ferrite (comme celui décrit par ailleurs sur ce site) dont la valeur d'atténuation est connue mais qui ne sont utilisables qu'à des fréquences inférieures à 100 MHz. Au cas où cette atténuation ne suffirait pas, il suffit d'ajouter un ou plusieurs atténuateurs calibrés de manière à rester dans la gamme de mesure de l'appareil. Comme les valeurs d'atténuation s'ajoutent, la transposition de l'échelle est simple à faire.
     Avoir une valeur de puissance en dBm c'est bien, mais encore faut-il la convertir en Watt qui nous parlent mieux, d'où la nécessité d'avoir le tableau ci-dessous (obtenu avec le tableur EXCEL) à portée de main.


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     Profitons-en pour faire quelques rappels sur les décibels.

     Le décibel est une manière simple de représenter un gain ou une atténuation. C'est 10 fois le logarithme en base 10 du rapport de puissance et 20 fois pour la tension ou l'intensité.
     Si le rapport est supérieur à 1, il s'agit d'un gain et les dB seront positifs. S'il est inférieur à 1, ils seront négatifs indiquant une atténuation.
     Les décibels s'ajoutent, en valeurs positives ou en valeurs négatives. Un étage d'amplification de 26 dB suivi d'un étage de 14 dB offrira un gain total de 40 dB, noté + 40 dB. A l'inverse, un atténuateur de 10 dB suivi d'un autre de 6 dB offrira une atténuation totale de 16 dB, noté -16 dB.
     Concernant les puissances, il existe des valeurs remarquables que l'on doit garder à l'esprit : Un doublement correspond à
3 dB, quatre fois plus, c'est 6 dB, 10 fois plus: 10 dB, 100 fois plus: 20 dB, etc. 16 dB c'est 10 dB + 6 dB ce qui fait 10 fois et 4 fois, soit 40 fois.
     Pour les rapports de tension ou d'intensité, le principe est le même, mais la valeur en dB est égale à 20 fois le logarithme en base 10 du rapport des valeurs à condition d'avoir les mêmes valeurs d'impédance, sinon il faudra passer par les puissances.
     Pour déterminer le rapport des puissances correspondant au gain en dB, il faut faire l'opération inverse : R = 10(G/10). Par exemple, le rapport de puissance  correspondant à 17 dB est de 10 puissance 17/10, soit 101,7 = 50,1

     Voici une autre table (obtenu avec le tableur EXCEL) évitant les calculs :


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     Le dBm ou dB milliwatt.

     Mais revenons à l'échelle de notre appareil graduée en dBm. Alors quelle est la différence ?

     Tout simplement, nous fixons une référence à notre échelle en dB. Ce sera 0 dBm = 1 milliwatt sur une charge de 50 ohms, ce qui correspond à 224 mV efficace. Il est important de spécifier la valeur de l'impédance de charge car 0 dBm sur 50 ohms ne correspond pas à 0 dBm sur 75 ohms et encore moins sur 600 ohms (échelle "audio" sur certains anciens multimètres à aiguille).
     On rencontre cette façon d'indiquer la puissance sur certaines fiches de caractéristiques d'émetteurs. En utilisant le tableau ci-avant, on détermine rapidement à quelle puissance, en watts ou dizaines de watts, correspond la valeur indiquée.
     Pour un calcul plus précis, on utilisera les formules suivantes :

                      dBm = 10 . Log PmW                   dBm = 10 . Log (PW . 103)                 PmW = 10(G/10)

     Les décibels sont aussi utilisés pour quantifier la force de réception des signaux radioélectrique à l'aide du S-mètre. Il y aurait beaucoup à dire sur cet appareil, censé être de "mesure" (!). Le tableau ci-dessous, indique les valeurs normalisées par l'ARRL et que trop peu d'appareils sont capables de suivre.


 

     Pour terminer cette page sur les décibels, signalons qu'on peut trouver, en particulier chez les fabricants d'antennes, des dBi et des dBd.
     Ces valeurs se rapportent au gain d'une antenne, soit en rapport avec un aérien isotrope qui, théoriquement, rayonne dans toute les directions (dBi), soit par rapport au dipôle demi-onde (dBd).
     La plupart du temps, l'indice n'existe pas et les fabricants se réfèrent à l'antenne isotrope sans le dire explicitement, ce qui permet d'ajouter subtilement 2,14 dB à la réalité en référence au dipôle.

     Et puisque nous en sommes aux antennes, nous ne pouvons passer sous silence les notions de PAR et PIRE.
     La PAR est la Puissance Apparente Rayonnée (ERP = Equivalent Radiated Power), c'est-à-dire la puissance transmise à l'antenne multipliée par le gain de celle-ci, par rapport au dipôle.
     Si nous soulignons ce dernier terme, c'est qu'il existe une autre puissance rayonnée, la PIRE, Puisance Isotropique Rayonnée Equivalente (EIRP = Equivalent Isotrop Radiated Power).
     Cette fois-ci le gain est exprimé par rapport à l'antenne isotropique qui, comme nous l'avons vu précédemment, rayonne dans toutes les directions.

     Illustrons cette différence par un exemple :

     Nous avons un émetteur de 100 W et une antenne d'un gain de 10 dBd, soit 12,14 dBi, la PAR sera de 1 000 Watts et la PIRE, de 1 214 Watts en supposant des pertes nulles dans le coaxial.

     Et pour aller plus loin dans la connaissance des décibels: http://www.rohde-schwarz.com/appnote/1ma85.html

DERNIÈRES NEWS !

     On trouve maintenant sur eBay des AD8307AR en SOIC-8, sans marque et en tout cas pas d'Analog Devices. Ces circuits sont vendus à un prix défiant toute concurrence : 4,30 euros les 10, port compris au lieu de plus de 10 euros partout ailleurs.
     Curieux, nous avons (sans grand risque !) commandé un lot de ces circuits, pensant constater des performances catastrophiques.
     Eh bien non, après avoir relevé les courbes à différentes fréquences, on constate une linéarité excellente de 0 à -50 dB comme en témoigne le graphique ci-dessous :

     A vos porte-monnaies !

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