Lampemètre uTracer 3+

 


Avec une majestueuse 807, symbole du radioamateur (la fameuse "807 à col doré" !)

     

Une fois n'est pas coutume, nous allons nous intéresser ici aux lampes, non pour les utiliser mais pour les vérifier et mesurer leurs caractéristiques.

     Il exist(ait)e dans le commerce des appareils dits "lampemètre" qui, par un test électrique, indiquaient l'état de la lampe par trois plages colorées sur un galvanomètre et, au mieux, une échelle indiquant la conductance Gm en micromhos. Si ce genre d'appareil était très utile à l'époque, il ne donnait pas grand-chose sur les caractéristiques des lampes testées. Pour cela, il fallait se tourner vers des appareils beaucoup plus sophistiqués à la portée d'un laboratoire, mais pas d'un amateur.

     Malheureusement (ou heureusement, c'est selon !), les lampes ont pratiquement disparue, les dernières à tenir le coup étaient les tubes cathodiques des téléviseurs et des oscilloscopes. Dans le domaine radioamateur, il en reste dans des amplificateurs de puissance. Même les émetteurs de radiodiffusion et télévision sont passés aux semi-conducteurs ainsi que beaucoup de radars de surveillance aérienne. Il n'empêche qu'il y a un certain renouveau, en particulier auprès des amateurs de musique et à en croire les 1253 uTracer déjà vendus au 30 mars 2018, ils sont nombreux.

     Néanmoins les lampes font un retour en force du côté de la Hi-Fi et il en reste quelques-unes en fonction dans des amplis de puissance côté radioamateur. Et puis il y a aussi la nostalgie de ressortir ces belles endormies qui ont enchantées les yeux par leurs formes et leur lueur, les plus âgés d'entre nous.
    Et puis également de les faire revivre, au moins dans un appareil de mesure et d'avoir le prétexte d'entamer un montage. Restait à trouver la perle rare, c'est à dire quelqu'un qui s'est penché sur la question.
    Et cette perle rare existe en la personne de Ronald qui propose un kit permettant de déterminer les caractéristiques d'une lampe avec un montage à la fois simple, sophistiqué et particulièrement performant.

     Nous nous arrêterons un instant sur cette entreprise familiale (sans but lucratif) dont tous les membres participent ou ont participé à ce projet qui court toujours. A en croire le nombre de kits vendus, on imagine qu'ils ont fait le bonheur de beaucoup d'amateurs.
    Il faut également souligner la qualité de cette réalisation qui a dû nécessiter des centaines d'heures d'essais à en croire la description du projet sur des dizaines et des dizaines de pages, toutes plus intéressantes les unes que les autres.

http://www.dos4ever.com/

 

DESCRIPTION

     

Schéma de principe du uTracer (dessin repris sur le site dos4ever.com)

     Elle sera sommaire car sur le site de Donald se trouve toutes les pages relatant la genèse et la finalisation de cet appareil. Disons simplement qu'il permet de mesurer et de tracer les courbes caractéristiques que l'on trouve dans les catalogues des fabricants de l'époque. L'astuce consiste à faire varier par pas successifs la tension grille négative et à chaque pas, d'alimenter pendant 1 milliseconde l'anode et l'écran et de faire une mesure d'intensité pendant ce court laps de temps. Naturellement, on peut aussi faire l'inverse et faire varier les tensions anode ou écran en gardant la tension grille constante. On peut même faire varier la tension filament ! Bref, en mélangeant toutes ces variantes, on aboutit à 13 possibilités qui conduiront à autant d'affichage de courbes avec même des calculs de Gm, Mu et Rp. Autant dire que c'est un appareil universel et un rêve pour l'amateur nostalgique des lampes.

     Voici à quoi ressemble le "tableau de bord":

 

 

RÉALISATION


Le fond du chassis


L'envers de la face avant

 

    Nous ferons une description complète de cette réalisation, à chacun d'y puiser éventuellement ce qui l'intéresse.
    Le kit est fourni complet avec tous les composants et un circuit imprimé sérigraphié avec la référence du composant et même sa valeur, ce qui peut éviter des erreurs. Seuls les supports ne sont pas fournis car cela dépend des lampes que l'on veut tester.
    Comble du raffinement, la notice de montage à la "Heathkit" est fournie sous forme d'un livret illustré et relié, d'une trentaine de page, qui guide pas à pas avec une coche pour chaque élément soudé. Néanmoins, on le trouve en pdf sur le site. Et, cerise sur le gâteau, il est accompagné d'une jolie carte postale de Hollande avec dédicace en français au dos !

            

     Inutile de dire que le suivi scrupuleux de cette notice amène à un montage fonctionnel, dès la dernière soudure terminée sans compter que la mise au point se fait étape par étape au fur et à mesure du câblage.

     Reste à mettre le montage dans une boîte et à l'alimenter.

     Un chapitre du site (http://www.dos4ever.com/uTracer3_page9.html) est consacré à la description des réalisations des personnes qui ont bien voulu y figurer. C'est très instructif car il n'y a pas deux montages identiques et on peut y puiser des idées.

     D'abord l'habillage. De type "valise", il est pratique et élégant. En effet, on trouve sur Internet des valises en aluminium et carton très abordables, du plus bel effet et dont les dimensions (330 x 230 x 160) sont parfaites pour cette application.
    Concernant les supports, nous avons choisi une voie souple et évolutive car on ne sait pas à l'avance quelles lampes on sera susceptible de tester et une fois la plaque support percée et câblée, il est difficile d'y ajouter un perçage et de modifier le câblage.
    La solution adoptée est l'utilisation de boites TEKO P2 que l'on trouve facilement et dont la face supérieure en aluminium est percée selon les supports de lampe utilisés. A l'opposé, c'est un connecteur SubD mâle 9 broches qui vient faire la liaison électrique. Pour éviter de tâtonner pour mettre la boite en place, il est prévu quatre plots de centrage qui font office de pieds lorsque le connecteur est enfoncé complètement. Dans la valise est prévu un compartiment qui peut accueillir trois boîtiers.

Affichage analogique

     Quoiqu'absolument pas indispensables, quatre galvanomètres suivent les évolutions des différentes tensions appliquées au tube. Chaque galvanomètre dispose d'une interface pour transformer la tension en courant par une résistance ajustable. L'interface consiste en un petit circuit imprimé plaqué à l'arrière de chaque galvanomètre. Concernant les deux "haute tension" de plaque et d'écran, une diode zéner de 20 V permet de soustraire la tension de repos qui correspond à la tension d'alimentation.
    Seule la mesure de la tension filament est un peu exotique et ce n'est pas vraiment une mesure car cette tension n'est pas continue, mais pulsée. Il n'est donc pas possible de la mesurer directement et c'est par un artifice qu'elle est transformée en analogique. Par contre, une vérification avec un oscilloscope digital calculant directement la valeur en Volt RMS a montré une parfaite concordance avec les valeurs programmées dans le logiciel qui correspondent d'ailleurs à celles calculées par une formule théorique.
    Un NE5534 transforme les impulsions de rapport cyclique variable en une tension de 0 à 5 Volts. Cette tension est ensuite traitée par un TL081 dont la contre-réaction par diode élargit la plage de mesure des tensions faibles. Une diode Schottky montée en inverse, court-circuite la sortie du TL081 (c'est permis!) en présence d'une tension négative au repos. L'aiguille du galvanomètre se place alors légèrement à gauche du 0. Sur l'échelle de ce galvanomètre, un 0 en rouge marque le zéro mécanique au repos sans tension.

    Pour des commodités de câblage, un circuit imprimé avec connecteurs reçoit les différents branchements à la carte principale.


 

Alimentation

     Côté alimentation, il est suggéré d'utiliser une alimentation à découpage d'ordinateur portable. C'est une solution économique mais que nous n'avons pas choisi car aucune n'est disponible ici. Ayant tous les composants, nous avons fait une alimentation classique de 20 Volts avec un LM317 et un transformateur 24 Volts 25 VA. Pour éviter toute inversion de polarité pendant les essais, une diode en inverse a été soudée sous le circuit imprimé de l'uTracer.

     Les dissipateurs pour boîtier TO220 sont fournis mais nous avons trouvé que la température atteinte par deux des régulateurs était très élevée, peut-être pas suffisamment pour les mettre en danger, mais par principe de précaution nous en avons fabriqué un pour IC1 LM337 et mis deux dos à dos pour IC10 le LM7805.

        

     Le montage nécessite un PC avec liaison série RS232 ou un port USB. Dans ce cas, il est nécessaire de faire appel à un convertisseur USB-RS232 que l'on trouve sur eBay. C'est la partie un peu délicate et il est fortement conseillé de tester le programme avec ce convertisseur avant d'envisager l'achat du kit. C'est faisable avec un connecteur SubD femelle 9 broches câblé selon les directives données sur le site de l'auteur ou dans la notice de montage (téléchargeable aussi sur le site).
    Au sujet de ces convertisseurs, il se peut que leur installation se fasse sur un port COM supérieur à 10. Si vous avez déjà installé un certain nombre de dispositifs sur les différents connecteurs USB de votre ordinateur, Windows réserve à chaque fois un numéro de port qui ne sera peut-être plus utilisé et cette réservation peut dépasser 10 et ainsi interdire l'utilisation de "debug" dans uTracer qui est limité à 10. La méthode la plus simple est d'aller dans le Gestionnaire de périphérique, soit par une invite de commande, soit par le bouton "Démarrer" puis "Panneau de configuration" puis "Système et sécurité" (dans Système) puis "Gestionnaire de programme".
    Cette nouvelle fenêtre liste tous les périphériques et en particulier les ports COM et LPT. En cliquant sur cette ligne, on fait apparaître les ports en cours d'utilisation. Pour afficher ceux qui ne sont pas utilisés, il suffit de cliquer sur "Affichage" et "Afficher les périphériques cachés". Ceux en grisé sont des ports réservés qu'il est possible de supprimer par un clic droit et "Désinstaller". On pourra ainsi retirer un périphérique non connecté mais dont le numéro est inférieur à 10. Si le convertisseur branché a un numéro supérieur à 10, il faudra lui attribuer ce numéro que l'on vient de supprimer. Un clic droit puis "Propriétés" puis "Paramètres du port" puis "Avancé" et dans cette fenêtre changer le numéro du port COM.

 

Boîtier support


                
(avant câblage)

     Actuellement au nombre de quatre, ils sont équipés des supports les plus courants. Les voici, avec les caractéristiques mécaniques de chaque support de façon à pouvoir les distinguer.

Miniature B7G  7 broches à 45° de diamètre 1,02 sur une circonférence de 9,53 mm. 
Noval B9A  9 broches à 36° de diamètre 1,02 sur une circonférence de 11,9 mm.
Octal K8A  8 broches à 45° de diamètre 2,36 sur une circonférence de 17,5 mm. Plot central de diamètre 7,8 mm.

Magnoval B9D  9 broches à 36° de diamètre 1,27 sur une circonférence de 17,5 mm.
Rimlock B8A  8 broches à 45° sur une circonférence de 11,5 mm avec encoche latérale de positionnement.
Loctal B8G  8 broches à 45° de diamètre 1,3 sur une circonférence de 17,5 mm. Plot central de diamètre 6,7 mm.

Transcontinental P8A  8 broches latérales, 4 à 30° et 4 à 54° sur une circonférence de 29,5 mm.
European G8A  Groupe de 5 et 3 broches à 26,5° sur une circonférence de 28 mm.

British B4
American UX5

     Les boîtiers sont des TEKO P2 dont le fond a été découpé pour recevoir une fiche SubD de 9 broches mâles. Quatre pieds de centrage permettent de les guider lors de leur introduction.
    Le câblage suit les préconisations recommandées pour éviter toute oscillation parasite par l'utilisation de VK200 et de tubes en ferrite entre chaque support.

Branchement des lampes à tester

     Suivant l'exemple de Ronald et pour faire simple nous avons adopté le même système de fiches et de cordons pour faire les connexions entre les différentes électrodes. Pour faciliter le câblage et un démontage éventuel, les douilles châssis de 2mm sont montées sur un circuit imprimé, lui-même fixé sous la face avant. Un autre circuit imprimé supporte la fiche DIN 9 femelle 9 broches.
     Chaque lampe ou groupe de lampes a sa fiche carton qui indique clairement les liaisons à effectuer. Deux exemples parmi d'autres:

     

     Pour pouvoir tester une lampe, il faut également connaître le brochage et les valeurs des différentes tensions qui sont indiquées dans les catalogues et mémentos des fabricants de l'époque ou se référer à une "bible" comme le lexique des lampes radio de Gaudillat que l'on trouve encore sporadiquement aux enchères sur Internet.

 

COMPOSANTS

     Pour les supports de lampes, à part quelques exemplaires que nous avions déjà, ils proviennent de deux sources:
     - Vacuum Tubes Inc. à Orlando aux USA (http://www.vacuumtubesinc.com)
     - Frag Jan Zuerst - Ask Jan First GmbH à Lehe en Allemagne (http://www.fragjanzuerst.de)
     - Farnell pour les galvanomètres et quelques composants (en particulier les tubes en ferrite à placer sur les fils des supports        de lampe).
     - Reichelt pour les petits composants.
     - eBay pour le convertisseur USB-RS232, mais attention, tous ne fonctionnent pas correctement à cause du non-respect         des plages de tension de la norme RS232.

 

UTILISATION

     Nous ne nous étendrons pas sur le sujet car sur le site de Ronald se trouve le mode d'emploi détaillé et des exemples de caractérisation de lampes. Malgré tout, ici un exemple avec une tétrode emblématique, la 807 bien connue des anciennes générations de radioamateurs. Ses caractéristiques dépassent les capacités du lampemètre, soit 400 V et 200 mA, mais celui-ci permet déjà de bien contrôler ce type de lampe.

     Exemple avec l'intensité plaque en fonction de la tension plaque pour une tension grille donnée:


Courbes tirées d'un catalogue RCA

 

     Exemple avec l'intensité plaque en fonction de la tension plaque et écran reliés (triode) pour une tension grille donnée:


Courbes tirées d'un catalogue RCA

     On voit que cette 807 est en assez bonne santé !

CONCLUSION

     Il est évident que cet appareil ne sera pas utilisé quotidiennement, mais cela reste un réel plaisir de se replonger dans ces composants un peu oubliés mais qui ont fait le bonheur des anciens.
    Pour tout connaître sur les lampes, signalons, parmi tant d'autres, un excellent ouvrage paru en 1945 et écrit par un Lieutenant-Colonel du Signal Corps : "Inside the vacuum tube" de John F. Rider. Plus de 400 pages avec de nombreuses illustrations dignes d'ouvrages de vulgarisation. Il est disponible en téléchargement (fichier pdf) à l'adresse : https://archive.org/details/InsideTheVacuumTube/page/n0
    Et le "Vade-mecum" de 1245 pages (!) en pdf à l'adresse: http://www.tubebooks.org/Books/RDH4.pdf.

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